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Tenney yevet
Yevet Crandell Tenney is a Christian columnist who loves American values and traditions. She writ...

Quand vous êtes grand-mère et que vous voyez tout ce qui vous entoure sous un angle plus large, vous regardez la vie avec admiration devant la façon dont votre vous-même plus jeune voyait le monde et vous vous émerveillez devant la myriade de changements qui ont transformé votre esprit et votre cœur pour comprendre ce que signifie être mère.

Enfant, j’étais insouciante et naïve à propos de la vie conjugale. Ma sœur, mes cousines et moi jouions à la poupée avec des marionnettes en papier. Nous construisions avec des aiguilles de pin des maisons ayant autant de pièces que nous le voulions. Nous habitions en rêve dans de grands manoirs. Nous n’aurions jamais imaginé que les pièces devaient être nettoyées et entretenues avec un balai, une vadrouille et un seau. Nous avions la certitude que nous trouverions le prince charmant dès la fin du secondaire et que nous allions par la suite vivre heureuses pour toujours. Mes sœurs et mes cousines se sont bel et bien mariées dès la fin du secondaire, mais, de mon côté, j’ai pris un chemin différent. Quant au bonheur pour toujours, nous l’attendons encore à ce jour!

De nombreuses fêtes des Mères ont passé avant que je ne rencontre mon prince charmant. C’était difficile pour moi à cette époque parce que je ne comprenais pas. J’allais à l’église et c’était inévitable : les mères étaient le sujet de tous les témoignages. On y lisait des poèmes à leur intention et on leur distribuait des fleurs. Je me sentais alors très seule dans ces moments-là. Lorsque j’ai eu 30 ans, un âge où j’ai commencé à avoir davantage l’air d’une mère de famille, les enfants qui distribuaient les fleurs ont insisté pour que j’en prenne une. Au début, j’ai protesté en disant : « Je ne suis pas une mère! », ce à quoi les enfants m’ont dit, d’un ton rassurant : « Un jour, vous en serez une ». À 30 ans, j’en doutais sérieusement, mais les regards pleins d’espoir qu’ils m’ont adressés ce jour-là m’ont conquis et j’ai pris les fleurs. Puis, je suis rentrée chez moi, j’ai mis les fleurs à la fenêtre et, seule, j’ai fondu en larmes…

Année après année, je plaçais des fleurs à la fenêtre et cela me réconfortait lorsque, témoins de mon rituel, les gens me disaient : « Vous n’avez pas besoin d’être mère pour être maternelle. Regardez tous les enfants que vous maternez quand vous leur enseignez à l’école. Regardez toutes les pièces de théâtre que vous avez écrites et qui ont touché les gens. Vous êtes une mère! »

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Malgré tout, le vide dans mon cœur était toujours là : je voulais être une vraie mère. Je voulais entendre ce mot magique sortir de la bouche de mes propres enfants. Je voulais qu’ils m’apportent leurs premiers dessins gribouillés et qu’ils me disent : « Maman, c’est pour toi! » Je voulais que mes fils disent, comme Abraham Lincoln : « Tout ce que je suis ou aspire à devenir, je le dois à ma sainte mère. » Je voulais que les enfants de l’église soient mes propres enfants chantant pour moi.

Finalement, je me suis mariée et je suis devenue instantanément mère de six enfants. En outre, au fil du temps, nous en avons accueilli et adopté cinq autres en famille d’accueil. Ils m’ont apporté les cartes et les cadeaux faits maison que j’avais tant désiré. Ils m’ont chanté des chansons et dit des « je t’aime, maman ».

Un jour de la fête des Mères, je me suis assise dans l’assemblée pendant que mon plus jeune chantait avec les autres enfants. Il est venu me voir après la célébration : « Maman, pourquoi pleurais-tu quand nous chantions? » Je n’avais pas encore trouvé les mots pour répondre quand il m’a tendu une carte faite maison... « Je suis si heureuse! », lui ai-je dit. Il a alors plissé le nez. Je savais qu’il ne comprenait pas, mais il n’a pas prolongé le sujet, passant à autre chose. Bon nombre de mes petits-enfants ont aussi chanté dans la chorale et j’en ai toujours eu les larmes aux yeux. Mon rêve d’enfance continue de se matérialiser sans arrêt et je chéris ces moments.

Votre vision à grand angle de grand-mère vous fait réaliser à quel point être mère est synonyme de sacrifice. C’est un consentement à abandonner qui vous pensez être pour quelqu’un que vous deviendrez éventuellement.

Quand j’étais célibataire, j’avais le temps d’être sentimentale et de placer des fleurs à la fenêtre. J’avais le temps de méditer sur les lectures de poésie à l’église. J’avais le temps d’étudier les cartes de la fête des Mères que les enfants fabriquaient à main levée pour leurs mamans. Une fois devenue mère, le temps se faisait rare pour être sentimentale. Entre la lessive, la cuisine, le ménage et les multiples allers-retours en ville pour magasiner et rassembler mes enfants éparpillés aux quatre coins de l’univers, il y avait peu de temps pour souffler et encore moins pour être sentimentale.

Le travail d’une mère est une suite interminable de demandes pour ceci ou cela. « Maman, peux-tu faire ça? Maman, j’ai besoin de ça. Maman, où sont mes sous-vêtements? Maman, mes devoirs étaient juste là; tu ne les aurais pas vus? Maman, peux-tu m’emmener à l’entraînement? Maman, j’ai faim! » Le mot magique « Maman » est comme la sonnerie d’une cloche surutilisée. J’ai commencé à me demander parfois qui m’avait transformée en esclave de l’univers!

J’ai vite réalisé qu’une mère est un autre nom pour un ouvrier non qualifié qui doit agir professionnellement et instantanément, sans formation ni expertise. Vous êtes médecin à 3 heures du matin lorsque votre petit garçon a 40 degrés de fièvre. Vous êtes la psychologue quand votre préadolescente vous dit : « Maman, personne ne m’aime! » Vous reprenez au pied levé le métier de traiteur ou de chef pour un dîner au retour à la maison de 14 convives. Vous jouez le rôle de conseillère scolaire en aidant vos élèves du secondaire à gérer leur emploi du temps. Vous êtes la coach professionnelle de votre jeune joueur de baseball de même qu’une experte en musique pour votre enfant qui débute le piano. Vous êtes conseillère financière. Vous devez éviter de vous ruiner en tirant le maximum de chaque dollar. Vous êtes jardinière, plombière, menuisière et mécanicienne. Vous devenez même l’enseignante experte alors que les nouvelles mathématiques vous semblent être du chinois.

Une mère porte tellement de chapeaux qu’elle pourrait remplacer Bartholomew Cummins, personnage principal d’un livre populaire de mon enfance écrit par le Dr Seuss, qui, lorsqu’il enlevait son chapeau, en voyait tout de suite un nouveau apparaître sur sa tête.

Quand on est mère, les récompenses paraissent rares et tardent souvent à venir. Parfois, vous attendez des années avant de voir le fruit de votre travail. Année après année, vous luttez pour inculquer des principes moraux et une solide éthique de travail à vos enfants et vous vous demandez s’ils en comprendront un jour l’importance. Année après année, ils vous regardent en levant les sourcils et vous disent : « Maman, c’est tellement stupide! Personne d’autre n’a à faire ça! Pourquoi nous, on doit le faire? »

Enfin, un jour, vous recevez une lettre par la poste d’un étudiant qui vous écrit : « Maman, je suis tellement content de savoir tout ce que tu m’as appris. Ensuite, vous entendez une jeune fille se lever lors d’une rencontre avec ses pairs et parler de moralité. Elle vous cite tout en pensant que les mots sont les siens. Votre fils est choisi par son employeur comme employé modèle et est mandaté pour représenter l’entreprise.

La meilleure des récompenses est de voir vos enfants avec leurs propres enfants s’efforcer pour leur enseigner les mêmes valeurs que vous leur avez transmises. Vous voyez leur frustration et vous souriez en sachant qu’un jour tout ira bien. Ce sont là les vraies récompenses de la maternité. Maintenant, en tant que grand-mère, vous voyez des petits-enfants mariés câliner leurs bébés et vous savez qu’ils suivront vos traces.

Cela me rappelle une histoire que ma mère m’a racontée quand j’étais enfant. Quand ma mère était elle-même enfant, elle adorait sa grand-mère. Elle voulait être avec elle et la suivait partout. Aussi, lorsqu’elle traînait de la patte en marchant, elle s’amusait à mettre les pieds dans les traces de pas de sa grand-mère.

Des années plus tard, lorsque sa grand-mère est décédée, ma mère s’affairait à entretenir le jardin du vieux ranch où elle avait l’habitude de jardiner avec sa grand-mère lorsqu’elle était enfant. Elle marchait dans la terre fraîchement labourée. Elle remarqua quelques traces entre les rangs qu’elle venait de creuser. Elle s’arrêta et les regarda. Son cœur s’était mis à battre : il s’agissait des traces de sa grand-mère! Même profondeur, même torsion du pied, même distance entre les pas. Sa grand-mère était morte depuis des années, mais ça ne pouvait qu’être ses traces de pas. D’où venaient-elles? Maman avait alors longuement étudié les traces avant de réaliser qu’il s’agissait de ses propres traces de pas! Elle avait passé tellement de temps à marcher sur les traces de sa grand-mère lorsqu’elle était enfant que, malgré le passage des années, elle marchait encore exactement comme elle!

De mon côté, mon grand angle de vision de la vie m’a permis de voir les traces laissées par ma mère pour moi de même que son visage sur mon visage. Parfois, quand je me regarde dans le miroir, je la vois debout, là devant moi, seulement pour réaliser que c’est moi.

Quelle merveilleuse bénédiction d’être mère, malgré toutes les frustrations et les chagrins qui accompagnent la vie quotidienne. Ce n’est qu’après avoir parcouru le chemin qu’une mère a parcouru, pleuré ses larmes, souri à ses triomphes et récolté ses récompenses que vous pouvez vraiment apprécier ce que cela signifie d’être une mère.