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Carvalho murilo
Territory Manager / Boehringer Ingelheim
Murilo Carvalho was formerly the education and extension technical specialist, member and custome...

Parlez à n’importe quel producteur laitier dans le monde de ses objectifs et il est à peu près certain qu’il mentionnera l’amélioration de la production. Ce n’est pas difficile à comprendre : la production de lait est la raison d’être d’une exploitation laitière. La vente de lait est le principal revenu de 99 % des producteurs laitiers. Les exploitations se différencient par la façon dont elles gèrent leur système de production et leur environnement (type d’étable, alimentation au pâturage, pâturage avec supplémentation), la race de leurs animaux, le type de leur salle de traite... et ainsi de suite. Cependant, une grande partie de tout cela se résume à la vache elle-même! Au Canada, nous disposons d’un caractère d’évaluation génétique unique qui permet d’évaluer la capacité de maintenir la production au fil du temps : la persistance de lactation compare la production lors du pic de lactation avec la production à 280 jours en lait (JEL). En sélectionnant des vaches qui ont une persistance de lactation élevée, on parvient à obtenir de plus grandes quantités de lait sans demander aux vaches d’atteindre des pics plus élevés.

Comprendre l’évaluation génétique

Comme toutes les autres évaluations des caractères fonctionnels, la persistance de lactation est exprimée sur une échelle de 80 à 120, 100 étant la moyenne et 5 l’écart-type. Une femelle moyenne (évaluée à 100) produira environ 60 % de son pic de lait à 280 JEL. Chaque tranche de 5 points représente un écart de plus ou moins 3 % sur le plan de la persistance.

Il est également important de garder à l’esprit que la majorité des animaux atteindront une valeur comprise entre 95 et 105. Moins de 5 % d’entre eux seront évalués à plus de 110. Néanmoins, il est possible d’utiliser ce caractère comme un paramètre supplémentaire lors de la sélection axée sur la production. Il serait certainement souhaitable d’obtenir une production similaire et une meilleure persistance!

Persistance de lactation et production totale

Une vache qui présente une meilleure persistance de lactation est susceptible de produire davantage en fin de lactation qu’une autre vache dont la persistance n’est que moyenne. Au Canada, ce caractère a une corrélation génétique positive avec tous les autres caractères de production, tels que les rendements en lait, en gras et en protéine, ainsi que la résistance à la mammite et le nombre de cellules somatiques. En fait, si on sélectionne en fonction de la persistance, on bénéficiera éventuellement d’une production plus élevée de lait, de gras et de protéine tout en augmentant l’aptitude génétique des vaches à avoir un pis en meilleure santé.

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Le Tableau 1 suivant compare deux vaches qui ont un pic de lactation similaire, mais des capacités génétiques différentes au point de vue du maintien de la production. Il est à noter que même si elles atteignent un pic de production similaire, l’une d’elles finit par produire 1 000 kilogramme de plus tout en conservant un niveau de production plus élevé pendant plus longtemps.

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Plus de lait, mais moins de problèmes métaboliques

On sait que le début de la lactation joue un rôle important dans la réussite ou l’échec de cette lactation. En sélectionnant des animaux capables de produire de plus grandes quantités de lait, nous en demandons de plus en plus à leur métabolisme. Chaque producteur laitier sait à quel point cette situation est difficile pour les animaux. Le « bilan énergétique (et nutritif) négatif » est une expression que les éleveurs connaissent bien. Elle désigne essentiellement des vaches qui ne sont pas physiquement capables de consommer la quantité d’aliments nécessaire pour assimiler tous les nutriments requis afin de produire une telle quantité de lait. Si de nombreuses vaches parviennent à s’en accommoder, c’est aussi le moment où elles deviennent les plus sensibles à différentes maladies. La Figure 1 montre qu’environ un cas de maladie clinique sur trois survient au cours du premier mois de lactation, soit juste au moment où la consommation est faible par rapport à la production laitière correspondante. 

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La vache idéale est persistante

Si nous demandions aux producteurs laitiers de décrire leur vache idéale, le mot « rentable » reviendrait sûrement très souvent. Pour être rentable, une vache doit générer plus de revenus que de coûts, c.-à-d. qu’elle doit avoir une bonne production laitière, avec des teneurs élevées en matières grasses et en protéine. Pour y parvenir, nous devons amener nos vaches à être en gestation assez rapidement, car elles ne sont plus aussi productives après quelques mois en lait. Cependant, l’approche change un peu si la vache peut maintenir des niveaux très élevés pendant plusieurs mois. 

Comme nous l’avons mentionné précédemment, une persistance supérieure prolonge la période de rentabilité, de sorte que les vaches génèrent plus de revenus que de coûts pendant plus longtemps. Par conséquent, nous pouvons dire que la vache idéale aurait une courbe de lactation qui atteint un bon pic, mais une production qui reste aussi stable que possible après ce pic. Résultat? Une vache qui nécessite moins souvent d’être en gestation, ce qui crée moins de problèmes de transition pour le producteur, et qui a donc une bien meilleure longévité. 

Réduire le problème de la fertilité (et de la réforme)

Au Canada, les problèmes de fertilité représentent la principale raison de la réforme involontaire : dans plus de 20 % des cas, les vaches qui sont vendues pour la boucherie ont des problèmes de reproduction. Cependant, ces vaches ne sont pas nécessairement stériles ou incapables d’être en gestation. Il est probable qu’elles n’aient pas pu devenir gestantes dans le délai normal que le producteur considère comme optimal. La décision relève davantage de considérations économiques que de la fertilité réelle de la vache. Si nous demandions à un producteur de choisir entre deux vaches à vendre, il poserait sans doute deux questions : sont-elles gestantes et quelle quantité de lait produisent-elles? On peut affirmer sans risque de se tromper que le temps écoulé depuis le dernier vêlage de la vache ne serait pas un facteur décisif. Le producteur ferait probablement une nouvelle tentative d’insémination dans le cas d’une vache vide qui produit 40 kilogramme de lait par jour, même à 250 JEL.

Le gain de longévité

Dans un troupeau capable de maintenir une production élevée pendant plus longtemps, on peut choisir de prolonger la période d’attente volontaire (la « PAV » est le nombre de jours d’attente après le vêlage avant d’inséminer de nouveau les vaches) et déterminer le meilleur moment de rendre les vaches gestantes sans arriver au point où elles deviennent non rentables. Une production accrue sur une certaine période de temps contribue à éviter que les vaches ne prennent du poids en fin de lactation, ce qui réduit les problèmes métaboliques et autres maladies lors du prochain vêlage. On obtient une production plus élevée sans imposer de contraintes supplémentaires au métabolisme des vaches (plus faible risque de maladie). Les vaches ont alors de meilleures chances de devenir gestantes (et donc, restent dans le troupeau), ce qui réduit encore le risque de problèmes métaboliques lors de la lactation suivante. Pas mal, non?

Message à retenir

Au Canada, nous pouvons effectuer une sélection génétique de manière à favoriser non seulement une production laitière supérieure, mais aussi une meilleure courbe de lactation. C’est un avantage pour les producteurs qui cherchent à augmenter la production tout en réalisant un gain supplémentaire en matière de longévité et de rentabilité. De plus en plus de troupeaux très bien gérés partout au pays choisissent de prolonger la période de lactation de leurs animaux comme moyen d’accroître la longévité et de réduire les coûts. Cette méthode requiert de la prudence et une approche globale au sein du troupeau, mais elle peut se révéler très intéressante et rentable chez les animaux qui maintiennent leur production pendant une longue période.