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Madureira augusto
University of Guelph / Ridgetown Campus
Madureira was previously a graduate student at the University of British Columbia.

Pour obtenir de bons rendements, les fermes laitières modernes qui font vêler leurs vaches durant toute l’année doivent avoir des programmes de reproduction performants. Ceux-ci doivent favoriser des taux de remplacement suffisants, des rendements laitiers optimaux et un revenu constant tout au long de l’année. 

L’infertilité des vaches en lactation représente un défi majeur pour la production laitière. La diminution des performances de reproduction a été associée à une baisse des rendements économiques en raison de la réduction de la production par vache et par jour, de la baisse du nombre de sujets de remplacement et de l’augmentation de la réforme. 

Historiquement, une production laitière élevée a été associée à une diminution de la fertilité chez les vaches en lactation. La diminution de la fertilité pourrait être due à des facteurs génétiques, car d’autres caractéristiques – par exemple, la production laitière et les caractères de conformation – ont été privilégiées par rapport à la fertilité dans la sélection génétique. L’augmentation de la production laitière individuelle a été obtenue en partie grâce à des améliorations de la gestion ainsi qu’à une sélection génétique intensive. Il a également été démontré que cette augmentation de la production de lait était associée à une diminution des performances de reproduction, devenue une préoccupation majeure des éleveurs et de l’industrie laitière. Cependant, l’interprétation faite à partir des associations observées entre une plus grande production de lait et une faible performance de reproduction peut nécessiter une évaluation critique, car il s’est avéré qu’il s’agit d’une relation complexe. De plus, des pratiques inappropriées de gestion des vaches à forte production peuvent contribuer de manière significative à l’incapacité à concevoir et à assurer une gestation, quelle que soit le rendement en lait. 

Le taux génomique de gestation des filles est calculé à partir de la probabilité de gestation des filles d’un taureau et prédit l’amélioration génétique des taux de gestation d’une future fille d’un taureau. De meilleurs taux de gestation sont associés à une rentabilité accrue pour un troupeau ainsi qu’à une réduction de l’intervalle vêlage-conception. Une augmentation d’un point du taux génomique de gestation des filles entraîne une réduction de quatre jours de l’intervalle vêlage-conception. L’amélioration de la prédiction génomique pour le taux génomique de gestation des filles donne la possibilité d’utiliser ce taux comme critère de sélection pour améliorer la fertilité des vaches en lactation. Il a été rapporté que l’utilisation du taux génomique de gestation des filles dans les programmes de reproduction a inversé le déclin phénotypique de la fertilité chez les vaches laitières. 

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En plus des chances accrues de conception (ou de gestation par IA), la mortalité embryonnaire peut être considérée comme un indicateur de performance de reproduction. En effet, la perte tardive d’embryons entraîne des pertes économiques dues aux retards dans l’établissement de la gestation. Comme de multiples rapports ont démontré une mortalité embryonnaire pendant le premier tiers de la gestation (de 3,2 % à 42,7 %), c’est une composante importante de la reproduction et évaluer son association avec un indicateur comme le taux génomique de gestation des filles serait intéressant. 

Une étude menée entre 2018 et 2020 sur deux grands troupeaux au Brésil intitulée « Association entre les taux génomiques de gestation des filles et les paramètres de reproduction chez les vaches laitières Holstein » a récemment été publiée en anglais dans la revue Journal of Dairy Science. Cette étude a évalué la relation entre le taux génomique de gestation des filles et la gestation à la première insémination, la gestation par IA globale, les avortements et le comportement durant l’œstrus. En tout, ce sont 12 949 événements observés chez 3 499 vaches Holstein d’un seul troupeau qui ont été inclus dans l’étude. Aux fins d’analyse génétique, des échantillons de poils ont été prélevés du toupillon de la queue de chaque animal, vers l’âge de deux mois dans la plupart des cas. 

Des vaches en lactation ont été sélectionnées pour recevoir de la semence soit conventionnelle soit sexée par le biais d’un programme d’élevage qui met l’accent sur la sélection des taureaux. Le transfert d’embryons ou la semence de taureaux de boucherie ont été utilisés pour les vaches identifiées comme étant dans le 10 % plus faibles du troupeau selon soit le GTPI ou la valeur du Mérite net, la production laitière, la durée de la période de lactation ou les vaches inséminées à plusieurs reprises. Les taures ont été inséminées avec de la semence sexée dans le cadre d’un programme d’élevage axé sur la sélection des taureaux pour la première et la deuxième insémination, puis avec de la semence conventionnelle par la suite. 

Les résultats de cette recherche ont démontré qu’à mesure que le taux génomique de gestation des filles augmentait, les probabilités de gestation – à la première insémination ainsi que pour l’ensemble des gestations – augmentaient et les chances d’avortement diminuaient, indépendamment du rang de vêlage, c.-à-d. peu importe s’il s’agissait de taures, de vaches en première lactation ou de vaches plus âgées à leur deuxième lactation ou plus (Figure 1). 

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Fait intéressant, les vaches ayant un taux génomique de gestation des filles plus élevé étaient plus susceptibles de manifester des chaleurs le jour de l’IA à temps prédéterminé que les vaches ayant un taux inférieur. De plus, les vaches qui ont été inséminées après un œstrus (c.-à-d. observées en chaleur soit à l’aide d’une craie de marquage de la queue ou d’un moniteur d’activité automatisé) étaient plus susceptibles de devenir gestantes, tant à la première insémination post-partum qu’aux inséminations suivantes, et elles ont avorté moins fréquemment que les vaches ayant un taux génomique de gestation des filles inférieur (Figure 2). 

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L’association du taux génomique de gestation des filles et de la fertilité est restée inchangée quelle que soit la stratégie de sélection utilisée : un transfert d’embryon ou une insémination artificielle de semence de taureau de boucherie, sexée ou conventionnelle (Figure 3).

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L’association entre le taux génomique de gestation des filles et les résultats de la reproduction suggère qu’il est possible que la sélection d’un taux plus élevé puisse entraîner de meilleures performances de reproduction dans un troupeau. C’est l’une des premières études qui a pu démontrer et confirmer que ce marqueur génétique de la fertilité entraîne effectivement des chances de conception accrues, moins d’avortements ainsi qu’une meilleure expression des chaleurs.