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Schmidt renato
Forage Products Specialist / Lallemand Animal Nutrition
Renato Schmidt received his Ph.D. in animal nutrition from the University of Delaware and is empl...

Ce n’est un secret pour personne que les aliments pour animaux constituent l’un des plus importants investissements dans une exploitation bovine. C’est également l’un des éléments les plus importants pour maintenir le troupeau en bonne santé et l’entreprise rentable. 

En fin de compte, une meilleure alimentation signifie de meilleurs résultats à tous les niveaux, et assurer la meilleure qualité de l’alimentation commence par l’ensilage.

Un ensilage propre, hygiénique et de haute qualité est essentiel à la santé du bétail et nécessite une bonne compréhension de sa gestion. Toutefois, l’ensilage contaminé reste un énorme problème dans l’industrie, et l’une des plus grandes préoccupations est la contamination par le sol et ses conséquences. 

En plus d’augmenter le pouvoir tampon – c.-à.-d. la résistance aux changements de pH – de la masse fourragère en raison de ses propriétés chimiques, les particules de sol hébergent également un large éventail de microbes indésirables et les introduisent dans le processus d’ensilage, en particulier les spores de clostridies. Comprendre l’impact potentiel sur votre ensilage et les meilleures pratiques de prévention peut vous préparer, vous et votre bétail, au succès.

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La contamination par les sols

Lorsqu’il s’agit de garantir un ensilage hygiénique, l’une des considérations les plus importantes est la contamination par le sol. Des conditions de culture ou de récoltes inadéquates et de mauvaises pratiques d’alimentation sont quelques-unes des raisons les plus courantes de contamination par le sol.

Un signe de contamination par le sol est la présence d’un niveau élevé de cendres dans le fourrage. La teneur en cendres de l’ensilage provient de l’intérieur (de la plante) sous forme de minéraux comme le calcium, le magnésium, le potassium et le phosphore, mais aussi souvent de sources externes comme la saleté, la litière et le sable à la surface du fourrage. Bien que la teneur en cendres du fourrage soit généralement négligée dans les rapports de laboratoire, elle peut être utilisée pour estimer le niveau de terre introduite dans le silo avec le fourrage. La prévention de la contamination par le sol peut se faire par plusieurs façons, notamment :

  • Éviter de récolter du fourrage fortement versé
  • Régler la barre de coupe d’une faucheuse à disques pour qu’elle ne soit pas trop près du sol (2,5 à 3,0 pouces sont conseillés)
  • Utiliser des couteaux plats sur la faucheuse à disques, ce qui crée moins d’aspiration et apporte moins de terre avec le fourrage
  • Garder l’andain et les dents du râteau au-dessus du sol
  • Garder le fourrage fauché sur le dessus des chaumes, sans contact avec le sol
  • Entreposer l’ensilage sur des surfaces en béton ou en asphalte (Photo 1)
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Les amas et silos fosses sur un sol en terre battue peuvent présenter une contamination par le sol lors du remplissage ou de la reprise. Photo fournie par Lallemand.

Les clostridies  

Les clostridies constituent la principale préoccupation lorsqu’il s’agit d’ensilage contaminé par le sol. Les spores de clostridies sont abondantes dans l’environnement et donc dans les aliments, car elles résistent à la chaleur et aux autres traitements. Tout comme d’autres contaminants du sol, les clostridies peuvent se propager par du matériel contaminé et des pratiques de gestion de l’ensilage inadéquates.

Les clostridies sont sensibles au pH bas, ce qui contribue à expliquer le problème de contamination par le sol : des spores sont ajoutées par les particules du sol, et le sol ajouté retarde la baisse du pH. Les clostridies sont également plus actives dans les cultures à faible teneur en matière sèche, se traduisant par une fermentation plus prolongée et une baisse du pH plus lente. De plus, il doit y avoir des quantités adéquates de substrats fermentescibles (sucres simples) pour que les bactéries lactiques produisent l’acide lactique conservateur; par conséquent, surveillez attentivement les conditions de flétrissement (heure, météo) et évitez un remplissage lent ou retardé.

La fermentation des clostridies peut être détectée dans les ensilages par son odeur nauséabonde, son aspect visqueux et sa coloration foncée (Photo 2).

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Ensilage de petits grains normal (à gauche) et contaminé par des clostridies (à droite). Photo fournie par Lallemand.

Cette forte odeur peut également amener les animaux à refuser complètement l’ensilage. L’une des raisons de cette odeur nauséabonde est l’acide butyrique, produit à partir des sucres ou de l’acide lactique fermentés par des clostridies. Ceci entraînera également d’importantes pertes de matière sèche (MS) et d’énergie. De plus, certaines espèces de clostridies fermentent des acides aminés produisant des amines toxiques (par exemple la cadavérine de la lysine et la putrescine de l’arginine) et de l’ammoniac-N, de sorte que l’odeur pourrait être plus putride ou celle de poisson, respectivement, selon le type de clostridie et le profil de fermentation ultérieur.

Les clostridies peuvent faire des ravages sur le système digestif des bovins, entraînant une faible prise de poids ou une réduction de la production de lait, ainsi que des maladies métaboliques telles que la cétose.

La fermentation des clostridies peut être évitée grâce à des pratiques de gestion appropriées. Un niveau de pH inférieur à 5 commence à ralentir leur croissance, mais le pH critique pour les inhiber dépend du type de culture et de sa teneur en MS au moment de la récolte. Clostridium tyrobutyricum est une espèce commune trouvée dans l’ensilage et la plus tolérante aux acides, donc un pH efficace pour le contrôler doit être compris entre 4,3 et 4,5.

Il est également recommandé d’ensiler les cultures fourragères à un minimum de 35 % de matière sèche, car les espèces de clostridies ont des besoins élevés en eau pour leur croissance. Dans les régions ayant des antécédents de contamination par le sol et d’activité de clostridies, comme dans le nord-ouest du Pacifique, il est conseillé d’ensiler à 40 % de matière sèche. L’ensilage de fourrages plus secs peut entraîner des défis d’entassement – en particulier s’il s’agit de cultures de petites céréales, qui ont des tiges creuses – mais, comme me l’a dit un jour le regretté Dr Bolsen, je préfère faire face à une porosité élevée et à une instabilité à la reprise plutôt qu’à un désastre causé par les clostridies.

Au-delà de la prévention des maladies, garantir un ensilage propre améliorera également son odeur et son apparence, augmentant ainsi son appétence et contribuant à maintenir la consommation de matière sèche. De bonnes pratiques de gestion – notamment un ensilage adéquat, le nettoyage et l’entretien réguliers des installations et des équipements, ainsi que la surveillance des sources d’aliments et d’eau – contribuent grandement à la lutte contre la contamination.

Gérer votre ensilage

Afin d’éviter la contamination, il est important d’entreposer et de manipuler correctement les aliments pour animaux et l’ensilage. Tout commence par la priorisation de l’hygiène. Les étapes critiques pour ensiler correctement vos cultures fourragères comprennent : la récolte au bon stade de maturité et l’ensilage à la teneur cible en MS, la priorité à un entassement approprié et à un scellage rapide, l’entreposage dans des zones propres et sèches, une inspection régulière et, également, l’utilisation d’un inoculant de haute qualité.

Les inoculants protègent votre amas d’ensilage des microbes naturels et nuisibles (levures, bactéries et moisissures) en ajoutant des bactéries bénéfiques pour ce processus. Le bon inoculant maximisera la rétention de matière sèche et de nutriments, tout en maintenant la digestibilité des aliments et en assurant la stabilité aérobie; de plus, la récolte ensilée aura de bonnes caractéristiques hygiéniques.

Des recherches de l’Université de Floride (Tableau 1) ont montré que l’ensilage de graminées inoculé, ensilé à seulement 21,9 % de MS, présentait un taux de fermentation plus rapide (baisse du pH) et une plus grande récupération de MS au cours de la première semaine d’entreposage que l’ensilage non traité. 

Une économie de seulement 5 points de pourcentage sur la perte suffit pour obtenir un retour sur investissement de 4 : 1 (en supposant un ensilage évalué à 75,00 $ dollars américaines par tonne). De plus, à une ouverture du silo à 60 jours, l’ensilage non traité contenait 2,31 % d’acide butyrique, ce qui a confirmé l’activité des clostridies lors de ce traitement, tandis que l’inoculation n’en a entraîné aucune dans l’ensilage.

La prévention de la contamination de l’ensilage nécessite une attention aux détails et de bonnes pratiques de gestion. Même si cela contribue grandement à garantir la santé du bétail, ce n’est pas la seule pièce du casse-tête. 

De nombreux producteurs savent que même le meilleur ensilage peut bénéficier de l’effet positif des additifs alimentaires. 

Mais avant d’y arriver, vous devez commencer par votre ensilage. Heureusement, avec les bons outils et un engagement envers la qualité, les producteurs peuvent assurer le succès de leur ensilage, de leur bétail et de leur entreprise.

Renato J. Schmidt est spécialiste des produits fourragers chez Lallemand Nutrition animale.